vendredi 17 juin 2016

Ce matin et puis non.






il s'est levé et a constaté que ce matin

un jalonneur de temps s'est pris les pieds dans ses projets secrets

une danseuse de sentiments a chuté dans l'ombre des artères

un manipulateur de regards a cogné l'écume des grands soirs

une siffleuse de terre s'est retournée face aux bêtes invisibles

un constructeur de fluides a vu surgir un entre-monde de la page

une coureuse d'attente a ouvert les tableaux de bitume

un compteur de matière s'est entendu avec une vendeuse de regrets

une chercheuse de souvenirs a plié un passage de nuit

un graveur de vent a joué sous les routes liquides

un

non

non non non

il a pris son médicament et s'est recouché


mercredi 8 juin 2016

7.50




pas là pour
écoute
fouille
50%
pas grand chose
tentation
passé de mode
lignes carreaux
écoute écoute
un petit monde
trifouille
essaie
comptabilise
6 articles max
grincements
isolement
pas là pour
et quand même
au bout du compte
50%

revenir
écouter

Pied de biche



Au pied de biche si on vous le dit.
Que demain puisse s'ouvrir est déjà une bonne nouvelle en soit. On l'imaginait verrouillé, cadenassé, barricadé aux petits, modestes, fragiles, sans territoire et sans le sou.
Une fenêtre apparaît qui laisse entrevoir la possibilité d'un futur plus verdoyant, encore confiné pour l'instant mais il suffirait de plusieurs pieds de biche, d'une armée de pieds de biche pour faire sauter ce lourd cadenas que d'aucuns se plaisent à cimenter dès la première bouffée d'air frais venue.
On peut se laisser aller, maintenant qu'on a identifié l'outil ad hoc, à rêver d'un demain sans châssis ni chambranle, dont les contours seraient et resteraient flous et où, dès lors que le cadre aurait valsé, nous seraient évitées ces sempiternelles ecchymoses qui ternissent l'éclat de nos peaux gorgées de soif de vie.





samedi 4 juin 2016

Diapason.


Main du 3 juin 2016.


si temps à ne pas mettre main dehors il fait
un instant s'offrir la promenade chez soi
moments à prendre à plein regard

l'autre avait osé
s'était hissé
le temps il en avait plein sa besace
au projet qu'il formait tout entier se concentrait
jamais ne semblait s'épuiser
ni renoncer
jamais non plus ne s'inquiétait
de l'ombre qui s'avançait

la main embarque dans un temps autre
un instant étiré à jouir du regard
soi à mettre au diapason

l'autre avait senti
s'était figé
le temps il s'en souciait comme de rien
au repas qui s'annonçait tout entier se dédiait
toujours se dressait vers la tache
et scrutait
toujours aussi progressait
à l'ombre de qui observait

autre regard à promener sur le temps
offrir instants et moments au dehors
sa main à soi étirée comme un jouissance


jeudi 2 juin 2016

L'imparfait du processus.




Main du 2 juin 2016.

Etrange impression à l'idée de faire partie d'un jury pour qui comme moi n'enseigne pas. A regret je m'en rends compte à mesure que les années s'accumulent alors que simplement d'être père par deux fois (et d'ados qui plus est) place devant l'idée de transmission qu'on le veuille ou non. Singulier aussi d'aller en Ecole d'Art émettre un avis qui se devra d'être pertinent alors que d'école de quoi que ce soit je n'ai fait. La dernière fois ce devait être il y a quatre ou cinq ans et le souvenir d'une illégitimité passagère mais bien ressentie à se demander pourquoi moi qui suis hors des circuits traditionnels (ou en tout cas plus dans le mouvement des poussières établies et subventionnées), pourquoi pas tous ceux-là qui aimeraient tant reluire d'un avis décisif sur jeunes aspirants comédiens et en arriver à se dire pourquoi pas moi au fond. Oui pourquoi pas. Et souvenir aussi d'avoir postulé par deux fois au poste de chargé de cours (pas sûr de l'appellation d'origine contrôlée) et avoir remis un dossier dans lequel je souhaitais amener l'écriture (originale ou adaptation) dans le processus d'un module, déjà sur le chemin si nécessaire aujourd'hui d'inscrire l'écriture dans processus de vie, de création quelle qu'elle soit. Mais comment juger des étudiants dont je ne connais ni l'identité, ni le parcours, ni les motivations, ni les évolutions, ni les aspirations? Comment occuper cette place et remplir ce devoir quand ce qui me stimule en tout et partout c'est le processus, l'avancée, la recherche, le laboratoire permanent, le rugueux et l'âpre, l'imparfait et l'hésitant? Quels mots trouver qui ne soient pas stupidement définitifs et lisses? Comment ne pas heurter ni flatter ces jeunes gens qui de fantasmes en projections rêvent d'un accès illimité à la profession, si inconstamment professionnelle, si rarement accueillante à moins de correspondre aux esthétiques de par-ci et par-là et de se mouler dans le mouvement bien-pensant des vieux schémas? Le meilleur des encouragements ne serait-il pas de les inviter/inciter à créer tant qu'ils peuvent en structures et surtout hors structures, à être comédien et auteur et régisseur et producteur et scénographe et costumier et lecteur et inlassablement curieux de toute forme d'écriture, ancienne et contemporaine, à ouvrir grands les yeux sur le réel si bousculant pour nourrir toutes les fictions qu'ils seront amenés à incarner, évoquer, révéler. Ne sont-ils pas déjà en position de transmettre à leur tour?
Appelé à faire partie de ce jury en Art dramatique, je m'interroge. Pas sur la raison de ma présence, peut-être d'ailleurs ne suis-je là que pour remplacer un indisponible, mais sur la fragilité de l'exercice, mesurant les enjeux, devinant les attentes, pour eux comme pour moi, sans compter celles de l'institution aussi et de l'ensemble des deux jurys, interne et externe, tout ce petit monde devant rentrer chez lui le soir avec le sentiment d'avoir été juste et humain, même si hésitant et imparfait.




Eau et vélo.



Main du 1er juin 2016.


Chercher ordre et priorité d'une journée décomposée. Scruter état de grève du rail et déraillement du pays. Vouloir courir sous crachin mué en averse offrant aux limaces même le jour pour sévir. Attendre. Ranger dégâts oubliés d'une cuisine au service d'ados affamés. Ouvrir courrier gris et immuable avec indices gaz électricité à relever encoder envoyer et au final payer. Lire histoire d'enterrement sachant qu'à un prochain enterrement impossible d'aller. Scruter avancement de l'ail planté en octobre et peinant à arriver mature et dodu. Noter résultats  prise de sang avec attendus constats et mesures à prendre oh pas bien grave mais si facile d'être insouciant ou inconscient. Se rappeler que nombre de balais change bientôt et que inéluctable est le risque. Relire passage lu plus tôt et ne s'en pas souvenir. Attendre éclaircies pour suer sur macadam après mois d'abandon. Refaire café pour tenter le point sur priorités malgré journée qui file droit et dru. Se pencher sur Gorki qui veut avancer et n'attend qu'un peu de volonté. Respirer particules des avions souillant cour et potager avec limaces encore insensibles. Constater milieu d'après-midi que milieu d'après-midi est là déjà sournoisement. Simuler compréhension mathématiques si loin si loin dans la mémoire pour aider jeune ado à croire en pertinence du cours et réussite des contrôles imminents. Préparer thé églantier à partager pour réchauffer des froides mathématiques et des limaces irrespectueuses et des avions suintants. Trouver chemin peut-être dans scène sous la couverture entre la grand-mère et jeune Maxime Gorki. Constater que fin d'après-midi est là déjà inévitablement. Remplacer retrouvailles course à pied par vingt-cinq minutes vélo de chambre et jubiler de sueur dans le dos. Douche. Obéir conseils médecin et boire de l'eau de l'eau de l'eau. Garder l'ado qui sans train roulant restera plus longtemps sous le toit paternel. Regarder ado serrer le chat longuement et s'émouvoir. S'atteler repas du soir poisson courgettes tomates ça paraît être fait pour quatre et tout manger à deux. Voir propre histoire d'embonpoint dans téléfilm moyen curieux justement aujourd'hui. Constater que fin de soirée est là déjà décidément bonne nuit mon garçon bonne nuit et heureux d'un peu de temps à deux rien qu'à deux. Hésiter sur lecture couchée. Michon? Simenon? Bergounioux? Bon? Se relever cinq fois la nuit de l'eau de l'eau de l'eau et de la tisane bues.