mardi 18 octobre 2016

L'attente / 6. Tant de libertés prises à son égard.



L'attente perdait son temps. Cela en devenait déprimant. Rien ni personne ne se présentait à faire piaffer d'impatience. Il y avait ce jour-là une sorte d'absence d'urgence, un abandon de la frénésie collective, un relâchement de la tension individuelle. Une stagnation du stress-roi.
Elle fut obligée de regarder alentour, rendue à une solitude nouvelle, contrainte de poser sur le monde un regard autre. Elle vit des plantes grandir à vue d'âme, des arbres flotter de concert, des ciels se mélanger sans vergogne, des humains enchaîner leurs occupations dans le temps présent nécessaire à chacune d'elles. 
L'attente eut le sentiment que tous les éléments vivants qui l'entouraient, selon une temporalité propre, développaient une vie autonome où ni empressement ni appréhension ni oppression n'étaient de mise.
L'attente en resta muette et comme pétrifiée de tant de libertés prises à son égard.
Dans un silence inhabituel, elle se leva, prit une pierre lourde qui traînait là et se frappa la tempe d'un coup bref et puissant. Elle perdit connaissance.
Au réveil, rien n'avait changé.
Tout coulait.



Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire